« Il faut être honnête. Moi, je suis un peu islamophobe. Cela ne me gêne pas de le dire. »
Claude Imbert, LCI, vendredi 24 octobre 2003
Claude Imbert, pour les plus jeunes et pour ceux qui n’ont pas de temps à perdre ni devant la télé ni avec le Point entre les mains, est un vieux monsieur qui fut un temps directeur de la rédaction puis directeur général de ce magazine. Un jour à la télé, il a dit tout naturellement qu’il était islamophobe. Un faux coming-out qui n’avait pas de quoi défriser un caniche, n’est-ce pas, et qui, rassurez-vous, n’a pas défrisé un seul caniche ni un(e) seul(e) journaliste, permanentée ou non. Car la déclaration de Claude Imbert, hormis quelques piaillements convenus, n’a guère suscité de désapprobation. En même temps, l’islamophobie n’existe pas, c’est Caroline qui le dit.
Claude Imbert n’a plus de fonction dirigeante au Point. Pour autant, il semble avoir laissé sa marque de fabrique. Cette semaine, l’hebdomadaire, habitué à une certaine forme de journalisme et même condamné du fait de certaines pratiques (voir L’hebdomadaire français Le Point condamné par le Tribunal de Grande Instance de Paris), se proposait de tout dire aux Français sur ces méchants immigrés et assimilés qui font rien qu’à miner la France avec leurs mœurs dissolues et évidemment incompatibles avec la morale républicaine et tout le tralala.
Mais c’était sans compter la rouerie d’un Auvergnat habitant de Montfermeil, Abdel, qui a piégé un journaliste du Point en se faisant passer pour l’une des trois épouses d’un Français polygame d’origine malienne. Le procédé est évidemment moralement contestable. Cela dit, le résultat est consternant : il met au jour des pratiques journalistiques toujours en cours à un moment où chacun devrait faire des efforts pour préserver un vivre-ensemble fragilisé par les postures démagogiques d’un pouvoir aux abois. Le Point préfère jeter de l’huile sur le feu d’abord en traitant de façon particulièrement tendancieuse des sujets très délicats, ensuite en romançant la réalité : l’auteur du papier affirme, entre autres, que cette maman mariée à un polygame est « une jeune femme au joli visage légèrement scarifié de chaque côté des yeux ». Problème : ce journaliste n’a jamais rencontré ni Bintou ni Abdel, le véritable Bintou. La honte, la honte et le discrédit sur toute une profession. Cet épisode va faire très très mal au journalisme français.
Cette histoire en appelle une autre : quelques semaines avant l’été, une journaliste du Point nous contacte. Elle veut faire un article sur le marché du halal. Un peu perdue, presque paniquée, elle nous explique qu’elle n’y connaît strictement rien du tout. Et effectivement, elle n’y connaissait strictement rien du tout. Son domaine, c’est l’éducation. Bon prince (ou pauvre cloche), nous lui consacrons une bonne heure pour répondre à ses questions de béotienne. En septembre, surprise !, nous tombons par le plus grand des hasards sur une émission de radio consacrée au halal à laquelle elle avait été invitée avec une autre spécialiste de circonstances, qui maîtrise le sujet autant que nous l’œnologie. Et là autre surprise : cette journaliste, qui nous avoua ne rien connaître au halal, adopta la posture de ceux qui ont une parole d’autorité, que justifient généralement une connaissance, une expérience, bref une légitimité à tenir un discours fondé. Nous vous passerons l’ânerie monumentale qu’elle osa proférer à l’antenne. Une ânerie qui n’aurait guère d’importance si elle ne salissait pas toute une communauté, en l’occurrence celle qui pendant un mois, il y a quelques semaines, jeûnait.
Dans ce cas précis, comme pour ce journaliste piégé par Abdel, ces petits arrangements avec la réalité n’auraient guère d’importance si les conséquences sur la perception qu’ont les lecteurs du Point et d’autres journaux de ce type sur les habitants des banlieues françaises n’étaient pas catastrophiques. On ne joue pas avec la réalité et encore moins avec la vie des gens. Ce journaliste a sauté sur la bombe qu’il a lui même fabriqué.
Mais plus grave encore est la réaction du Point, plutôt que de faire amende honorable, le magazine s’excuse auprès… de ses lecteurs. Pas un mot pour ceux qu’on a voulu salir.
Pour en savoir sur cette affaire, consultez l’interview d’Arrêts sur Image et l’article qui va avec en cliquant sur le lien suivant : Polygamie : le Point en flagrant délit de bidonnage
Pris en flagrant délit d’amateurisme journalistique !
Voir cette vidéo : http://www.dailymotion.com/video/xf11j3_le-point-en-flagrant-delit-de-bidon_news?start=561#from=embed
Même si comme le précise Al-Kanz la démarche peut être moralement contestable, au moins il leur a donné une bonne leçon !
Triste dérive de personnes qui font ce beau métier…Mais belle leçon en même temps.
à qui le tour c est trés bon tout ça la preuve y est qu il y beaucoup de montage imaginez tout qu ils ont pu ecrire des mensonges …
Ou l’arroseur arrosé!
Et encore, il ne s’agit là de l’article ou ils se sont fait prendre; que dire de tous les autres? (je pense notamment à ceux concernant ces méchants musulman-e-s menaçant Dame République)
Quelle honte, c’est affligeant, et en même temps particulièrement caractéristique de la dérive journalistique amorcée depuis plusieurs années des médias français.
Assalamou alaikoum,
Une petite coquille « évident moralement contestable ».
Sinon, vraiment gonflée l’équipe du Point d’oser écrire sur leur site « Comment nous nous sommes fait piéger »… et de s’offusquer des méthodes du jeune Abdel (qualifié d’imposteur) alors qu’il n’a fait ni plus ni moins que d’user des mêmes procédés que ceux de beaucoup de journalistes (d’investigation notamment).
Ces derniers qui n’hésitent pas à travestir leurs identités et à filmer à leur insu les personnes rencontrées lors de leurs reportages.
Espérons que grâce à cette histoire, les gens (les musulmans en particulier) ouvriront les yeux et cesseront de prendre pour argent comptant ce qui se dit d’eux dans la presse française et occidentale.
Tu exagères Al Kanz, Le Point a reconnu ses erreurs : faute avouée à moitié pardonnée.
Je blague bien entendu 🙂 !
Ca ne m’étonne qu’à moitié à vrai dire.
Le journalisme est en crise. Les redacteurs en chef et journaleux ne vendent plus aussi bien leur torchons. Il faut du sensationnel pour nourrir nos journalistes nationaux. A croire qu’ils n’ont plus les moyens de se déplacer ou de faire un vrai travail d’investigation.
On a eu affaire aussi à Mohammed Sifaoui qui était pas mal dans le bricolage de reportages. Ca marchait plutôt bien pour lui jusqu’à ce que… les asiatiques le piège !
Je comprend maintenant pourquoi Tariq Ramadan n’accepte que du direct.
Est-ce vraiment étonnant, connaissant ce journal qui a laissé sont éthique au placard depuis bien longtemps (pour ne pas dire depuis toujours) en voulant alimenté la peur avec ses titres racoleurs et caricaturaux, en désignant toujours les musulmans, les noirs, maghrébins, habitants des quartiers populaire…
Avec ses chroniqueurs dont on connait l’idéologie (patrick buisson, BHL, claude imbert, ancien directeur de ce « journal », qui s’est déclaré ouvertement islamophobe sans que ça ne provoque d’indignation chez les journaleux et intellectuels de cour..)
Salam alaykoum,
Franchement très bonne initiative enfin on montre que ce que dise les journalistes n’est pas toujours la vérité et qu’il faut se méfier. Ce qui est dommage c’est qu’on en parle pas beaucoup dans les médias!!!!
Mais en tout cas bravo à la personne qui a écrit cet article trop bien écrit et bien sarcastique.