Mouton de l’Aïd : sur Internet, les annonces fleurissent d’année en année

Acheter son mouton vivant sur Internet. L’idée, qui aujourd’hui encore pourrait paraître farfelue, a pourtant été mise en pratique voilà plus de six ans par un chef d’entreprise marocain. Dès 2006, au Maroc, il était en effet possible d’acheter son mouton sur pied depuis le site Anaam.net, qui a, semble-t-il, disparu de la toile dès 2008, à tout le moins sous ce nom de domaine.

Peu de temps après, c’est au tour du site Al-Hawli, toujours au Maroc, de proposer des moutons sur pieds, c’est-à-dire vivants, sur Internet, avec photo et carte d’identité. Le site est toujours en activité, les moutons vendus en nombre.

En France, il n’existe pas, à notre connaissance, d’équivalent à Anaam.net ou Al-Hawli. Acheter son mouton, le ramener chez soi ou l’abattre chez le fermier, pour l’Aïd, est interdit. Policiers et gendarmes sont d’ailleurs depuis quelques jours sur le pied-de-guerre. S’il y a quelques années les forces de l’ordre se postaient, le jour de l’Aïd, sur les routes de campagnes pour contrôler les voitures susceptibles de transporter des carcasses de moutons abattus chez le fermier, cette année des contrôles ont eu lieu bien en amont. Il nous a en effet été rapporté que cette année des éleveurs de moutons ont reçu la visite des gendarmes, qui ont procédé à un premier décompte de leur cheptel. Décompte avant l’Aïd, décompte après : l’objectif est de s’assurer qu’aucun mouton n’a été vendu à cette occasion.

Pour autant, les annonces sont nombreuses sur les sites comme LeBoncoin. Là, encore des moutons sur des sites d’annonce n’est pas une nouveauté. En 2007, nous consacrions un billet à ce sujet : Dis Papa, achète-moi un mouton 2.0. Ce qui est nouveau en revanche, c’est le nombre important d’annonces par rapport aux années précédentes. Les éleveurs de moutons n’hésitent en effet plus à tenter la vente directe.

Hier, à deux jours de la fête, on comptait toujours plusieurs dizaines d’annonces et des centaines de moutons proposés dans toute la France.

Certains éleveurs ont continué aujourd’hui à poster des annonces (avec numéro de portable apparent).

Les prix sont le plus souvent exorbitants. Avec 200 000 ovins et 4 000 bovins, selon les chiffres de l’OABA, l’Aïd al-Adha est une aubaine, vitale pour nombre d’éleveurs français, qui peuvent vendre leurs bêtes au prix fort ; ce qui explique que les candidats au jackpot soient de plus en plus nombreux à vouloir vendre directement aux particuliers. Malheureusement, l’incapacité des autorités françaises à considérer le marché des consommateurs musulmans pour ce qu’il est, en l’occurrence un marché à forte valeur ajoutée et un relais de croissance. Sans parler de l’arbitraire qui régit les autorisations d’abattoirs mobiles…

Ce matin au SIAL (salon international de l’agroalimentaire), un entrepreneur musulman a invité Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, à s’intéresser à ce marché en pleine expansion. L’entrepreneur a été invité à discuter avec l’un des assistants du ministre. En tout état de cause, si, malgré les atouts majeurs dont elle dispose, la France boude le halal et plus généralement le marché des consommateurs musulmans, d’autres pays, dont l’Allemagne, la Belgique, la Pologne ou encore la Roumanie entendent bien tirer leur épingle du jeu. En septembre dernier, les Allemands montrèrent leur intérêt au halal… en France. Un comble.