Islam. Le président de la République serait-il sous emprise ? Si son discours de novembre 2017 s’articulait déjà autour du postulat, faux et dangereux, selon lequel il faudrait structurer l’islam en France, parce que notre pays a été frappé par le terrorisme, Emmanuel Macron n’avait, jusqu’à mardi 19 février, jamais cédé à l’aile extrémiste de son parti ni aux pressions de la droite et de l’extrême droite.
Détourner l’attention des Français
Mardi matin donc à Mulhouse, affaibli par les sondages et la perspective d’une débâcle pour son parti La République en marche (LREM) aux élections municipales de mars prochain, l’ancien ministre de François Hollande a choisi de s’en prendre aux musulmans, dans une allocution qui emprunte bien plus aux fantasmes qu’aux réalités de terrain.
Nul n’est dupe : en radicalisant sa position pour faire sienne celle de la gauche FN et de tous ceux qui haïssent les musulmans, Emmanuel Macron a moins cherché à dénoncer « le séparatisme islamiste » (sic) qu’à tenter de détourner l’attention des Français de leurs problèmes et de leurs préoccupations premières.
Une dérobade populiste
La « lutte contre le séparatisme islamiste » n’est pas seulement une grosse ficelle et un dérivatif, c’est aussi une vaste farce matinée d’hypocrisie : les islamistes désignés ne sont ni plus moins que les musulmans pratiquants. Le discours d’Emmanuel Macron emprunte à cette funeste pirouette par laquelle on dit « islamiste » pour signifier « musulman », comme d’aucuns disent « sioniste » quand ils pensent « juif ».
Le calcul est bassement politicien. La volte-face du président n’est pas idéologique, elle est électoraliste. Le premier de cordée appartient, quoiqu’il en dise, à cette vieille tradition de l’ancien monde, rance et malodorante, qui veut que, dans la tourmente, l’on voue aux gémonies une partie de la population.
Dans un communiqué de presse publié quelques heures après le discours d’Emmanuel Macron, la plateforme L.E.S. Musulmans a dit sa consternation et son inquiétude face à cette dérive de celui qui s’est présenté comme rempart contre toutes les haines. Extrait.
Il est non moins malheureux de relever que la laïcité est une nouvelle fois dévoyée de son sens profond, quand un président de la République pourtant élu pour apaiser ces questions, s’autorise à dicter aux dignitaires du culte musulman les modalités de leur organisation et leur cadrage idéologique, en leur donnant un ultimatum (le CFCM est ainsi sommé de s’exécuter avant le 30 mars, sous peine de l’écarter au profit d’interlocuteurs plus dociles). La laïcité ne consiste-t-elle pas à respecter l’autonomie des communautés religieuses, dans le plus strict respect des lois, dans un dialogue sincère et constructif avec la République ?
Le Président, s’agissant des musulmans, s’est dit vouloir être « fraternellement autoritaire ». Mais l’autoritarisme n’est jamais « fraternel ».
[…] Le plan ainsi initié par le gouvernement, dont l’essentiel consiste à entraver les structures musulmanes en détournant des procédures sanitaires, financières et réglementaires usuelles pour en faire des instruments de répression, va conduire à un double échec :
- d’une part, un échec politique, puisqu’il vient légitimer et valider une grille de lecture idéologique raciste émanant de l’extrême-droite, qui construit les musulmans comme un problème à réguler et à contrôler, au sein de la République, ouvrant la voie au pire.
- d’autre part, un échec sociétal, puisqu’il marquera dans l’histoire en le signant de son nom le moment où la République aura fait de ses citoyens musulmans des objets assignés au choix qui n’en n’est pas : vivre une religion conditionnelle, soumise au temps politique des extrêmes, ou partir.
Ce choix destructeur, nous le refusons. En tant que citoyens. Nous lui substituons un espoir. En tant que croyants.
Pour lire l’intégralité du communiqué de presse, rendez-vous sur le site de la plateforme L.E.S. Musulmans en cliquant sur le lien suivant : Macron et les musulmans : le point de non-retour ?