Ramadan 2021 – 1442. Comme en 2020, le confinement interdit aux musulmans de France d’accomplir les prières de tarawih, ces prières collectives à la mosquée qui ont lieu tous les soirs de ramadan après la dernière prière quotidienne.
Ils sont aussi privés de la prière d’avant l’aube qui doit être accomplie avant la fin du couvre-feu, levé seulement à 6 heures du matin. Ou plutôt ils en étaient privés
Dans un communiqué publié en début de soirée, le Conseil français du culte musulman (CFCM) annonce qu’à sa demande une dérogation a été accordée par le ministère de l’Intérieur. Et conclut en ces termes : « le CFCM recommande aux imams de retarder cette prière dans la mesure du possible pour permettre un usage utile et limité de la dérogation. »
Cette recommandation comme la dérogation sont pour le moins surprenantes :
1- retarder la prière du matin est une possibilité que tant les imams que les fidèles, à la maison, ont : on peut en effet l’effectuer jusque quelques minutes avant le lever du soleil. A Lille, il s’est levé aujourd’hui à 6h54 ; à Marseille à 6h56. Soit près d’une heure après le couvre-feu. A la fin du confinement national, soit le 3 mai, le soleil se lèvera à Lille à 6h19 et 6h29 à Marseille.
2- l’intérêt d’une telle dérogation pendant ramadan, c’est de permettre les prières de tahajjud (l’équivalent de tarawih, mais dans le dernier tiers de la nuit). Ces prières s’effectuent avant la prière de l’aube. Or, ce n’est pas le sens de la dérogation du CFCM.
Comme nous le confie un imam, quid de la valeur juridique de ce communiqué ? Le ministère de l’Intérieur a-t-il émis une circulaire ? Y a-t-il un texte officiel dont les fidèles pourront disposer sur eux en cas de contrôle et éviter ainsi toute contravention, voire pire.
Au-delà de cette dérogation, il ne faut pas être dupe : d’abord il n’y a ni souci du CFCM pour les communautés musulmanes ni faveur de la part de Gérald Darmanin.
Cette apparente concession ne fera oublier ni la charte de la honte assumée par le CFCM, mais rédigée par les services du ministère de l’Intérieur – très probablement par Louis-Xavier Thirode, ce conseiller cultes et immigration qui a récemment mis à l’amende Chems-Eddine Hafiz, recteur de la mosquée de Paris, après sa sortie contre l’ingérence décomplexée de Marlène Schiappa dans le culte musulman –, ni la loi dite « séparatisme », loi d’exception contre les musulmans, criminalisés et stigmatisés.