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Hajj 2024 – 1445 : faudra-t-il vraiment payer le surplus exigé par certaines agences de voyages ?

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350, 490, 500, voire 950 euros. L’an dernier, des agences de voyages ont exigé des candidats au pèlerinage à La Mecque qu’ils paient plusieurs centaines d’euros en plus du forfait, déjà bien salé, acheté sur Nusuk. Les autorités saoudiennes n’ont pourtant eu de cesse de répéter qu’il ne fallait rien payer en dehors de leur plateforme officielle de réservation en ligne.

Rencontre avec les Saoudiens

Décembre 2022. Des responsables d’agences de voyages françaises rencontrent leurs homologues saoudiens pour discuter de l’organisation du hajj. A cette occasion, les seconds assureront aux premiers que le hajj ne peut se faire sans eux. L’Arabie saoudite est toujours dans une phase de transition entre la formule à l’ancienne, celui d’avant 2020, et la formule Vision 2030 — du nom de ce projet qui doit voir le royaume complètement métamorphosé.

Il s’agit en outre de ne pas commettre les mêmes erreurs qu’en 2022 avec la plateforme Motawif ; remplacée en 2023, Nusuk devait répondre au plus près aux besoins des pèlerins, tout en évitant les couacs passés.

De nouveau de la partie après trois années blanches et difficiles, les voyagistes rentrent en France avec l’assurance de signer dans les semaines qui suivent le contrat qui les liera à leurs partenaires saoudiens.

D’ici là, ils doivent s’assurer d’avoir fait le plein de candidats au hajj : « Les Saoudiens nous ont demandé de commencer à démarcher les futurs pèlerins afin de pouvoir être réactifs dès l’ouverture des inscriptions », confie Samir*, directeur d’une agence de voyages, à Al-Kanz.
Les premières dérives commenceront là.

Faire le plein de candidats à l’aveugle

Janvier 2023. Plusieurs agences de voyage lancent leur opération commerciale, ignorant pourtant tout des décisions à venir et autres changements prévus par l’Arabie saoudite.

Elles ne connaissent ni les tarifs qui seront appliqués ni le contenu des forfaits ? Qu’à cela ne tienne ! Il faut faire le plein de candidats le plus rapidement possible, quitte à leur mentir et abuser de leur confiance et de leur méconnaissance.

Certaines n’hésiteront pas à recycler leur communication d’avant 2020 qu’elles savent pourtant caduque et laisseront croire aux internautes musulmans qu’elles sont officiellement « agréées » par l’Arabie saoudite ; autrement dit qu’elles ont, comme jusque 2019, la main sur l’organisation du hajj. Ce qui est proprement faux.

Ainsi, bien que côté saoudien rien n’est encore prêt, ni acté, et encore moins officiel, en France, les annonces se multiplient sur les réseaux sociaux. Les plus aventureuses de ces agences iront jusqu’à proposer à la vente des forfaits purement spéculatifs (hôtels, vols, dates) et exigeront des acomptes entre 500 et 2 500 euros : toutes veulent prendre dans leurs filets le maximum de futurs pèlerins avant fin février.

Aucun paiement en dehors de Nusuk

Cette campagne agressive, et en partie mensongère, se heurtera rapidement à la communication des autorités saoudiennes avec, le 8 février 2023, le lancement en grandes pompes de Nusuk, et un message qui sera dès lors répété, martelé, par Tawfiq Al-Rabiah, ministre du Hajj et de la Omra en personne : les pèlerins ne doivent réserver et acheter leur hajj que sur cette plateforme officielle, seule « agréée pour les pèlerins du hajj de l’étranger ».

Interrogé par Al-Kanz, le président d’une société saoudienne coorganisatrice du pèlerinage confirmera « que, conformément aux réglementations du ministère du Hajj, le guide du groupe doit assister les pèlerins pendant tout le séjour sans aucun paiement supplémentaire requis. » Et de préciser que « tous les services inclus dans le forfait » seront délivrés sans que le pèlerin n’ait à payer quoi que ce soit en sus.

Aucun paiement ne devait donc se faire en dehors de Nusuk. Le message était on ne peut plus limpide. Des agences de voyages françaises, insatisfaites du partenariat qu’elles auront pourtant accepté sans que nul ne les y contraigne, refuseront de l’entendre de cette oreille : les pèlerins qu’elles réussiront à ferrer paieront… ou seront abandonnés une fois en Arabie saoudite !

Tu paies ou tu n’auras pas de guide

En reprenant complètement la main sur le hajj des pèlerins d’Europe, des Amériques du Nord et du Sud, d’Australie et de Nouvelle-Zélande, l’Arabie saoudite a relégué les agences de voyages, autrefois partenaires à part entière, au rang de simples prestataires de services, au même titre que les compagnies aériennes ou les hôteliers.

Fini le hajj organisé de A à Z, fini le pactole et les centaines de milliers, voire de millions d’euros de bénéfices engrangés à chaque édition. Les voyagistes doivent se contenter d’endosser uniquement le rôle de guide et de renoncer à la manne qui a fait leurs beaux jours pendant des décennies.

Les plus récalcitrants, pourtant informés dès 2016 à l’occasion de la présentation du plan Vision 2030, feront le choix de soutirer plusieurs centaines d’euros à des pèlerins tout à la fois démunis et manipulés.

Sans interlocuteurs officiels vers qui se tourner, nombre de fidèles finiront en effet par céder au chantage, affectif et religieux, qui leur sera imposé : soit payer entre 490 et 950 euros par personne soit accomplir un pèlerinage sans aucun guide, bien que ce service était inclus dans le forfait acheté sur Nusuk.

Un guide pour chaque forfait, rappelait le consulat français

Si en 2022, avec Motawif, il était encore difficile à quelques jours du début du hajj d’obtenir des informations fiables et surtout définitives, en 2023, les pèlerins pouvaient plus facilement trouver réponse à leurs questions.

Dans une brochure mise à la disposition des pèlerins, par exemple, le consulat français à Djeddah rappelait qu’« un guide (accompagnateur fournissant des services de soutien et d’orientation) est rattaché à chaque forfait proposé. »

Or, ne pas avoir de guide durant le hajj, c’est pour l’écrasante majorité des fidèles l’assurance d’un pèlerinage invalide, tant cet acte d’adoration exige d’une part un certain bagage religieux, d’autre part une connaissance du pays et de l’organisation millimétrée de ce rassemblement annuel.

Une fois en Arabie saoudite, les pèlerins qui refusèrent ce chantage virent mises à exécution les menaces proférées dès leur inscription sur Nusuk : « Pas du tout pris en charge le jour du départ, nous avons été délaissés à notre arrivée sur place », témoigne Hanane* à Al-Kanz. Et d’ajouter : « Nous n’avions aucun guide à Médine », contrairement aux pèlerins contraints de prendre la formule dite « VIP », véritable tour de passe-passe d’une agence en particulier, qui, après les vives protestations exprimées sur les réseaux sociaux, choisit de changer de fusil d’épaule dans sa communication fallacieuse.

Il ne s’agissait plus de facturer des « frais de service », en réalité indus, mais d’offrir un pack comprenant prétendument des services complémentaires, un accompagnement personnalisé et du matériel adapté. En somme, un hajj prétendument personnalisé avec guide VIP… vendu sous le manteau.

Ces voyagistes malveillants ont ainsi pu être doublement rémunérés : d’une part dans le cadre de leur partenariat avec les organisateurs saoudiens, d’autre part avec l’argent soutiré aux pèlerins.

Malgré le préjudice, les procédures envisagées un temps, en France, par des victimes, qui se comptent par centaines, ont été rapidement abandonnées, offrant ainsi aux margoulins du hajj un sentiment d’impunité qu’ils cultivent là encore depuis des décennies. Au détriment des futurs pèlerins.

Quid cette année ? Comme en 2023, les autorités saoudiennes répètent le même message sur les réseaux sociaux (voir visuels ci-dessous) : aucun paiement ne doit se faire en dehors de la plateforme Nusuk Hajj.

Nusuk Hajj unique plateforme de réservationNusuk Hajj unique plateforme de réservation

Le hajj 2024 – 1445 devrait débuter aux alentours du 14 juin et prendre fin vers le 19 juin in sha’a-Llah.

* Le prénom a été modifié.

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7 Commentaires

  1. Tout d’abord je vous remercie pour votre site internet et ces nombreux articles.
    J’ai l’habitude de consulter votre site quelques fois afin d’être informé sur l’actualité de la communauté.

    L’article que vous avez écrit est pas nouveau et s’inscrit dans une longue tradition de dérives d’un certains nombres d’agences de voyages.
    Créer une black liste serait peut être utile aux membres de la communauté afin de ne pas tomber dans le piège de ces agences.

    • Merci à vous pour votre intérêt.
      J’ai une question je vous prie, pour bien comprendre votre propos : s’agissant de la blacklist, qui devrait l’établir et en vertu de quoi ?

      • As Salam Aleykoum wa rahmatoulah wa Barakatou.
        Comme toujours un très bel article masha’Allah.
        Je ne sais pas s’il faut créer une « blacklist » comme le préconise ME163. Par contre il faut dénoncer ces agences ou voyagistes frauduleux afin que les gens n’aient plus recours à leur services. Il manque peut-être une structure en France qui servirait à dénonce, réguler ces dérives, mais bon au vue du flou artistique qui règne déjà au niveau des instances ou « représentants » de la communauté musulmane de France, difficile d’imaginer une telle structure.
        À nous de nous réformer en premier lieu et incha’Allah de prendre les choses en main.
        Qu’Allah nous facilite.

        • wa ‘alaykum as-salam wa rahmatuLlah wa barakatuh

          1- Qui se charge de les dénoncer ?
          2- Ce flou artistique est secondaire. Il n’y a pas besoin des représentants pour agir. Le problème vient de nous. Un cancer nous ronge : nous attendons systématiquement que d’autres agissent à notre place.
          3- Amin

          • As Salam Aleykoum wa rahmatoulah wa Barakatou.
            1. Les pèlerins qui ont subis ces escroqueries doivent les dénoncer et faire passer le message autour d’eux, sur les réseaux…
            Pour moi celui qui se tait et laisse faire est complice.
            2. Je suis d’accord avec toi. J’ai eu l’occasion d’échanger sur un groupe Facebook de partage d’info sur le Hajj et la Omra. Beaucoup se plaignent d’avoir subi le chantage que tu denonce dans ton article, lorsque je demande les noms des agences, les gens me disent qu’ils préfèrent ne pas donner le nom des agences concernées… Je ne comprends pas… On subit des injustices, on s’en plaint et on ne fait rien pour que nos frères et sœurs ne la subissent pas à leur tour.

            Qu’Allah nous guide, nous purifie, nous soigne de notre égoïsme.
            Encore merci pour tes articles de qualité comme je prends plaisir à lire. Les sujets sont toujours très bien choisi.
            Barak Allah o fik.

  2. Dans mon premier post, je mentionnais l’idée d’une liste noire.
    1° Qui devrait l’établir ?
    Des groupes de travail issus et sélectionnés parmi les principales grandes mosquées de France ( PARIS, LYON, MARSEILLE, BORDEAUX,… ).
    Ces groupes de travail ferraient un travail de terrain, mèneraient des enquêtes, regroupant les témoignages des plaignants.
    2° en vertu de quoi ?
    Les commerces de ceux qui dépouillent les fidèles sur le chemin de DIEU ne doivent pas prospérer.
    Cette liste noire est un outil d’alerte comme peut l’être une alarme pour prévenir d’un vol.

    Prendriez vous un avion d’une compagnie aérienne black listée?
    Prendriez vous une offre commerciale d’une agence de voyage black listée?
    Moi, je réfléchis pas deux fois!

  3. Salam alaykoum très bon article je suppose que les agences doivent avoir un numéro d’agrément auprès des ait saoudienne non ? On devrait disposer d’un endroit où on peut voir les références des agences pour ne plus être plumer, c’est triste pour les personnes âgées et ceux qui ne savent pas manipuler internet.

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