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« Le documentaire sur cheikh Bachir El-Ibrahimi est une autre expérience de lecture »

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Vendredi 24 janvier, un documentaire consacré à cheikh Bachir El-Ibrahimi, fondateur en 1931 avec cheikh Abdelhamid Ben Badis de l’Association des oulémas musulmans algériens, sera diffusé en avant-première dans les locaux de la librairie Al Bayyinah. A l’origine de ce projet, Thomas Sibille, libraire eat éditeur, revient sur la genèse de ce film et sur l’initiative « Un livre en immersion ».

Al-Kanz : La librairie Al Bayyinah et les éditions Héritage lancent conjointement un nouveau projet « Un livre en immersion ». De quoi s’agit-il ?
Thomas Sibille :
La mission que nous nous sommes donnée avec la librairie Al Bayyinah et les éditions Héritage, c’est de sensibiliser à l’importance de la lecture en général comme à la nécessité de diversifier ses propres lectures, à connaître les grandes figures de l’histoire islamique.

Depuis 2008, nous commercialisons et éditons à cet effet des livres. Nous organisons également des rencontres littéraires et désormais nous lançons ce nouveau concept « Le livre en immersion », dont l’idée est simple : il s’agit de partir d’un livre édité par nos soins et de marcher sur les pas de son auteur à travers un film documentaire.

Nous partons à la rencontre de ses proches et visitons son lieu de naissance. Nous interviewons des spécialistes de sa pensée. L’objectif est de donner corps au livre, de le rendre moins impersonnel et de créer une proximité entre le lecteur et l’auteur.

Al-Kanz : Le tout premier film du projet est consacré à Bachir El-Ibrahimi ? Pourriez-vous présenter cette figure majeure de la résistance intellectuelle et religieuse face à la colonisation française en Algérie ?
Thomas Sibille :
Mohamed Bachir El-Ibrahimi est une figure emblématique de l’histoire de l’islam contemporain. Il est né en 1889 dans le petit village algérien d’Ouled Brahem, dans une famille modeste, mais érudite.

Lors de son voyage en Orient, alors qu’il se trouve à Médine il rencontre Abdelhamid Ibn Badis, avec qui il conçoit l’idée d’une révolution intellectuelle pour défendre l’identité arabo-musulmane des Algériens qui font face à une politique coloniale aliénante.
De retour en Algérie, il fonde en 1931 avec d’autres érudits l’Association des oulémas musulmans algériens, dont la devise était : « L’islam est ma religion, l’arabe ma langue, l’Algérie ma patrie. »

Il ouvre des écoles, donne cours aux hommes et aux femmes, utilise la presse pour diffuser ses idées malgré la répression coloniale.

Installé au Caire à partir de 1952, il devient le porte-parole international de la cause algérienne. À l’indépendance en 1962, il célèbre symboliquement la première prière du vendredi à la mosquée de Ketchaoua, au pied de la Casbah à Alger, restaurée après avoir été transformée en cathédrale sous la colonisation.

Sa vie, sa personnalité et le modèle qu’il incarna et qu’il demeure sont des leçons vivantes pour nous musulmans en France. Bachir El-Ibrahimi nous dit la valeur du savoir, la place de l’éducation. Il nous enseigne la valeur de l’effort et du sacrifice. Parler de lui, c’est parler de nous, comprendre que quand tout semble perdu il y a toujours la possibilité d’agir et que la voie la plus efficace et la plus rapide, même si pour beaucoup elle semble longue, c’est la voie de l’éducation, condition indispensable à la réforme.

Documentaire, Bachir Al-Ibrahimi, par Al-Bayyinah et les éditions Héritage
Al-Kanz : Vous aviez la possibilité de présenter nombre de figures de premier plan du monde musulman à vos lecteurs. A-t-il été difficile de faire un choix et, surtout, pourquoi avoir choisi Bachir El-Ibrahimi, somme toute très peu connu en France ?
Thomas Sibille :
Le choix s’est porté naturellement sur Bachir El-Ibrahimi pour plusieurs raisons.

Passionné par l’histoire de l’Association des oulémas musulmans algériens, que ce dernier a cofondée, j’ai l’honneur de connaître son fils, le docteur Ahmed Taleb-Ibrahimi, ancien ministre algérien de l’Education et des Affaires étrangères, et son petit fils Bachir, à qui je rends régulièrement visite et avec qui j’ai noué une réelle amitié.

Ces relations privilégiées m’ont permis de découvrir plus avant la vie et l’histoire de Bachir El-Ibrahimi, particulièrement inspirantes : c’est d’ailleurs cette proximité, pour reprendre un terme évoqué précédemment, avec son fils et son petit-fils qui m’a poussé d’abord à éditer le livre puis à réaliser le documentaire.

L’engagement et les sacrifices de Bachir El-Ibrahimi pour l’éducation, la révolution culturelle et intellectuelle sont exemplaires. Alors que la situation semblait désespérée, il a lutté corps et âme pour ouvrir des écoles en dehors du système colonial, promu l’enseignement de la langue arabe, fait de la transmission des sciences islamiques une priorité. Par la plume, il a soumis les canons.

Cet homme est un exemple à suivre, un modèle de résilience et de sacrifice à faire connaître au plus grand nombre. Sa vie entière nous rappelle l’importance du savoir et de l’éducation dans notre quotidien, et même notre destinée.

J’ajoute que cette année correspond au soixantième anniversaire de sa mort. Il a en effet été rappelé à Allah le 20 mai 1965. Ce documentaire est une façon de lui rendre hommage et peut être le résultat de l’invocation d’ibn Badis qui au moment de son emprisonnement lui dit : « Par ta position, tu as honoré la science et la religion. Puisse Dieu te protéger, toi et ta descendance ici-bas et dans l’Au-delà et puisse-t-Il te rendre justice et considération devant l’histoire véridique. »

Al-Kanz : Qu’attendez-vous de celles et ceux qui regarderont le documentaire ?
Thomas Sibille :
J’espère que toutes et tous auront envie à leur tour de s’investir dans la révolution culturelle et spirituelle qui doit être menée aujourd’hui. D’ailleurs, cheikh Bachir El-Ibrahimi disait qu’être fidèle à l’héritage des ancêtres ce n’est pas en collecter les cendres, mais en transmettre la flamme. J’espère par ce documentaire original transmettre cette flamme !

Al-Kanz : Vous n’avez de cesse, à raison, de fustiger l’emprise des écrans sur nos vies. N’est-ce pas paradoxal d’inviter vos lecteurs à quitter leurs livres pour se tourner vers un de ces écrans ?
Thomas Sibille :
Je fustige l’emprise des écrans pour leur côté abrutissant et réducteur, qui participe à faire de l’homme un homme pensé, lequel dilapide son temps dans la futilité et le voyeurisme.
Pour autant, je ne suis pas contre les écrans quand ils sont bien utilisés et permettent de passer un message au plus grand nombre. C’est d’ailleurs pour cela que je publie de nombreuses vidéos sur les réseaux sociaux autour de la lecture et de la culture.
Et c’est à travers un écran que je souhaite donner envie de lire et de connaître l’histoire de grandes figures de l’islam. C’est une autre expérience de lecture qui j’espère atteindra son objectif, transmettre la flamme !

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